Communiqués de presse

Evaluer les médecins sur des quantités d'actes? Contre des pratiques managériales inadaptées à l'hôpital public

Avenir Hospitalier a pris connaissance des pratiques managériales en cours dans certains établissements de l’APHP, consistant à « noter » les quantités d’actes produites par chaque médecin, en n’oubliant pas au passage des réflexions qui sont plus que déplacées ou désobligeantes, quel que soit le statut de l’employé ou du salarié.

Connaissant bien au quotidien les difficultés à obtenir des données statistiques d’activité fiables, il semble très hasardeux d’en extrapoler des jugements individuels et d’en tirer des conclusions sur les quantités de travail fournies par un tel ou un autre : ce sont des pratiques managériales indignes qui ne reposent pas sur le respect et la dignité que chaque institution doit à ses acteurs.

Il est normal que chacun puisse témoigner de son travail, de la qualité de celui-ci, des problèmes qu’il peut rencontrer dans sa réalisation, des projets qu’il peut avoir. Nous travaillons dans la transparence, mais devons aussi travailler dans la confiance, et ne pas découvrir des jugements extérieurs aussi bien ridicules que pathétiques, en tout cas indignes du Service Public tel que nous le concevons, avec le management qu’il mérite.

Ces fichiers d’évaluation dont nous espérons qu’ils sont limités à quelques hôpitaux n’ont pas de raison d’être, ne peuvent être que contre productifs, et illégaux.

Avenir Hospitalier prêche pour une réforme managériale au sein des hôpitaux, qui remette l’humain au centre, basée sur respect, confiance, dialogue. Les pratiques de New Public Management ont fait la preuve de leur non adaptation à l’hôpital : il serait judicieux, au vu des problèmes actuels démographiques au sein des hôpitaux, de lancer une « révolution culturelle » : un hôpital pour les patients et pas pour les actes et la rentabilité, avec un management respectueux et adapté à ses acteurs. C’est le défi pour la période à venir, nous sommes nombreux à vouloir le relever. 

Restructurations hospitalières: Oui, mais pas n'importe comment!

Dans le contexte de contraintes financières nationales actuelles, la perspective de restructurations hospitalières se précise. Il va falloir du courage, notamment politique local ou régional. Avenir Hospitalier souligne que la ligne directrice  de ces restructurations doit être la qualité des soins apportés à l’ensemble de la population dans sa globalité.

Ceci ne signifie pas un hôpital devant chaque porte, mais l’accès dans des délais raisonnables à un plateau technique complet et dûment pourvu en effectifs  soignants… ce qui pourrait être une des solutions pour ne pas recourir systématiquement à un intérim médical couteux, très mauvaise solution à un vrai problème démographique.

Toute discussion de restructuration doit  commencer par un dialogue social de qualité au sein des hôpitaux concernés et de la région, et associer au plus près les usagers parfaitement conscients des enjeux proximité/ sécurité.

La finalité doit  clairement  être d’améliorer la qualité des soins prodigués,  de veiller à ce que  chaque centime du financement citoyen soit  éthiquement utilisé là où les soins le nécessitent et le justifient. Mais aussi le respect des équipes soignantes, qui subissent de plein fouet les conséquences de choix démographiques anciens et d’une course à l’activité à tout prix. Spirale infernale d’une intensification du travail qui jamais ne pose le problème de la pertinence des actes, ni leur qualité, ni le retentissement sur les organisations et les conditions de travail.

A ces conditions, Avenir Hospitalier  soutiendra les projets médicaux de restructurations sur le territoire.

L'hôpital public saura t-il mobiliser toutes ses compétences autour de la naissance ? De l'importance du travail en équipe

Les services de gynécologie et d’obstétrique hospitaliers sont marqués depuis plusieurs mois par un mouvement de revendications des sages-femmes hospitalières. Plusieurs séances de discussions portant sur le cadre métier des sages femmes et sur leurs modalités d'exercice au sein des services ont été à ce jour organisées. Les organisations représentatives des praticiens hospitaliers, attachés à la poursuite de l’amélioration de la  prise en charge des femmes enceintes dans tous ses aspects prennent en compte la plénitude des compétences des sages femmes.

Nous faisons cependant le constat de la persistance de  divergences par rapport aux demandes de changements majeurs d’organisation formulées lors de ces discussions. 

Nous tenons à rappeler, que comme toute forme de coopération entre professionnels (qu’elle soit entre personnels médicaux ou entre personnels médicaux et paramédicaux), celle-ci ne peut se faire qu’avec un accord sur  l’objectif et les méthodes  visant à l'amélioration de la qualité et de la sécurité des soins prodigués en toute circonstance.

La marge d'incertitude entre ce qui est conçu comme physiologique et ce qui peut devenir à tout moment pathologique pourrait dans certains contextes perturber la cohérence des prises en charge si les modalités d’exercice des deux professions médicales ne devenaient que  séquentielles au lieu d’être constamment associées. La notion même d’exercice à compétence propre nous parait liée à l’existence de modalités équilibrées, concertées et validées pour l’exercice des compétences partagées.

Considérant qu'une situation ne peut être considérée comme physiologique qu'à posteriori,  devant l'absence de méthode prédictive pour l'ensemble des pathologies, nous considérons que la gestion préventive et curative du risque nécessite une étroite et constante collaboration médecin et sage femme, intégrée  dans un fonctionnement partagé et respectueux, mais non cloisonné, sous l'autorité fonctionnelle des chefs de pôles.

Logiquement nous ne sommes donc pas favorables au terme d'unité physiologique, préférant celui de parcours ou d'espace de prise en charge des grossesses normales, dont l’identification claire serait a la fois un moyen de meilleure valorisation interne du métier de sage femme et de répondre à une demande des femmes concernées. Ce parcours non compliqué doit être organisé en respectant le libre choix d'y être prise en charge aussi facilement par les médecins spécialistes en gynécologie et en obstétrique que par les sages femmes. L’organisation de ce parcours ne peut donc être que l'aboutissement d'un projet d'équipe élaboré en concertation étroite associant aussi les personnels para médicaux. Ces projets, appuyés sur des protocoles de prise en charge, en concordance avec les recommandations professionnelles, devraient  alors facilement obtenir l'aval de la commission médicale d'établissement au sein de laquelle la profession de sage-femme est représentée. Dans ce cas, le Directeur pourrait nommer une sage femme pour assurer la responsabilité de cet espace par périodes renouvelables.

Nous n'avons jamais mis en cause la compétence du métier de sage femme et souhaitons bien au contraire qu’elle soit valorisée par les pouvoirs publics au plan statutaire et matériel. Nous souhaitons conforter les véritables équipes, en clarifiant notamment un positionnement aujourd’hui ambigu vis à vis d'une hiérarchie para médicale souvent illogique.

Pour autant nous ne pouvons pas accepter que cette légitime reconnaissance  soit construite sur une organisation fonctionnelle et administrative qui pourrait paradoxalement avoir pour conséquence d'exclure des médecins spécialistes hospitaliers d'une partie de leur cadre métier,  de déstabiliser le fonctionnement des blocs obstétricaux, ou d’augmenter à terme le risque médico-légal d’exercice pour les deux professions.

Sadek Beloucif - SNAM-HP
Rachel Bocher - INPH
Jean-Claude Penochet - CPH
Norbert Skurnik - CMH

Nicole Smolski –Avenir Hospitalier

Soutien au Dr Pequignot

Le Docteur Péquignot chef du service de SSR gériatrique des Hôpitaux de Saint-Maurice a été mis en examen le 26 mars 2014 suite à une plainte déposée par M. Fréchou, Directeur de son établissement.

Bref rappel des faits : le dimanche 9 septembre 2013, vers 14h, l’état de santé d’une patiente âgée de 80 ans  s’aggrave de façon inquiétante. L’interne demande qu’un bilan sanguin soit adressé en urgence au laboratoire du Centre Hospitalier Intercommunal de Créteil. L’unique ambulancier de garde ne peut assurer immédiatement le transport du prélèvement car il a dû aller chercher le Directeur à l’aéroport Charles de Gaulle. Le prélèvement ne sera acheminé qu’au retour de l’ambulancier et n’arrivera au laboratoire qu’à 16h36.

Le Docteur Péquignot adresse le 11 septembre 2013 au collège des médecins un mail dans lequel il pointe « une utilisation par le Directeur des moyens des patients pour son confort au détriment de leur sécurité » ;

En décembre 2013, le Directeur dépose une plainte contre le Dr. Péquignot pour « diffamation publique contre un agent de l’Etat », ce qui a entraîné la mise en examen du médecin, le 26 mars 2014, au Tribunal de Grande Instance de Créteil. Le 25 mars, le collège des médecins, à l’unanimité, avait affirmé son soutien au Dr. Péquignot. Le 27 mars un Comité de soutien se constitue, rassemblant les syndicats SUD et CGT des Hôpitaux de Saint-Maurice, le SNPHARe ( Syndicat National des Praticiens Hospitaliers Anesthésistes Réanimateurs Élargi), l’intersyndicale AVENIR HOSPITALIER et de nombreux membres du personnel médical et non médical.

Le Comité de Soutien s’insurge contre l’attaque en justice d’un médecin qui n’a fait que dénoncer la mise en danger d’une de ses patientes. Il appelle les professionnels de santé à signer une pétition intitulée « Tous responsables ! Alors tous mis en examen ! ».

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MOUVEMENT DES SAGES FEMMES : L’AVIS DES INTERSYNDICALES DE PH

Les Intersyndicales signataires suivent très attentivement le mouvement des sages femmes évoluant depuis 3 mois, et ne comprendraient pas ne pas être associées aux discussions en cours, en tant que leurs partenaires au quotidien auprès des femmes et en salle d’accouchement.

Ce mouvement, qui prend racine dans une démographie pléthorique, témoigne d’un déficit global de reconnaissance : rémunérations en comparaison avec celles des infirmières spécialisées, définition ambiguë de leurs tâches, en raison du « caractère médical à compétence définie » de leur profession, place donnée au sein de la gouvernance hospitalière à leurs cadres, valeurs universitaires de leurs enseignantes.

Ce déficit de reconnaissance doit être entendu rapidement, car ce mouvement génère notamment dans les salles d’accouchement des tensions délétères pour l’ensemble des professions qui les côtoient, et à terme pour les femmes.

Pour autant, nous alertons les pouvoirs publics sur les conséquences de déstructuration des équipes actuellement engagées auprès des femmes, et de l’équilibre actuel centré sur le pluri-professionnel et la complémentarité. Un accouchement dit physiologique devient rapidement à risque, et c’est le rassemblement d’équipes soudées autour de protocoles partagés qui permet de maintenir la sécurité des parturientes.

Nous alertons également l’ensemble des sages femmes et les pouvoirs publics sur l’aventurisme qui consisterait pour  elles à sortir de la Fonction Publique Hospitalière, pour  se diriger vers un statut de praticien hospitalier,  dont nous connaissons bien pour essayer de le sécuriser, les conditions délétères (temps de travail mal réglementé, conditions de retraite dramatiques, soumission croissante à la hiérarchie hospitalière depuis HPST).

Des négociations statutaires et salariales doivent s’engager rapidement pour une filière sages femmes spécifique, avec définition précise de leur métier reconnaissant leurs valeurs au sein d’une équipe pluri disciplinaire, que ce soit pour le dépistage et la prévention organisés, ou le suivi des grossesses ou l’accouchement. Les filières dites physiologiques en cours d’expérimentation  doivent être dûment évaluées avant de décider de leur extension. Le libre choix de la patiente doit être respecté, de même que les recommandations professionnelles.

L’encadrement sages femmes doit avoir sa juste place au sein de la gouvernance hospitalière. L’enseignement doit être identifié et valorisé au sein de l’université avec une filière spécifique en maïeutique, un statut universitaire pour les enseignantes, en veillant à l’articulation et la complémentarité avec l’enseignement des médecins généralistes, gynécologues et  obstétriciens, et pédiatres.

Nous engageons les pouvoirs publics à rapidement régler ce conflit, et à mesurer les lourdes conséquences de décisions qui bouleverseraient l’équilibre bien fragilisé de l’hôpital.

Dr BELOUCIF, SNAM-HP

Dr BOCHER, INPH

Dr PENOCHET, CPH

Dr SKURNIK, CMH

Dr SMOLSKI, AVENIR HOSPITALIER

 

Avec le soutien du Groupe Pasteur Mutualité

 

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Campagne nationale
" Dis Doc', t'as ton doc' ? "  pour faire évoluer le modèle culturel des médecins !

 

Retrouvez toute l'information dans le communiqué de presse (cliquez ici)

www.cfar.org/didoc/ 

 

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Actu'APH n°16

       

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     Les annonces de recrutement octobre 2023

 

             retrouver ces annonces sur le site reseauprosante.fr

 

Les dernières actus

75 % DES MEDECINS HOSPITALIERS RISQUENT DE QUITTER L’HOPITAL PUBLIC DANS LES 5 ANS… … PARCE QUE PERSONNE NE PREND SOIN DES MEDECINS HOSPITALIERS.

MISSION-FLASH : UN NOUVEAU RATAGE GOUVERNEMENTAL (PREVISIBLE) !

Ce vendredi 1er juillet, Action Praticiens Hôpital dévoilait à la presse les résultats complets de l’enquête « Nuits Blanches » sur la permanence médicale des soins à l’hôpital public : 75 % des praticiens hospitaliers risquent de quitter l’hôpital public dans les 5 ans à cause de la permanence des soins. En parallèle, le rapport de la mission-flash sur les urgences était remis à la Première Ministre. Un rapport sans doute amoindri à la demande de la Première Ministre, puisque seules 41 des multiples propositions [CP1] [WA2] envisagées par la mission ont pu figurer dans le rapport.

le dossier de presse

Lettre aux élus De La République

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Paris, le 22 juin 2022

Monsieur le Président du Sénat,

Monsieur le Président, Madame la rapporteure de la commission d’enquête sur la situation de l’hôpital et le système de santé en France

Mesdames les Sénatrices, Messieurs les Sénateurs,


Action Praticiens Hôpital, union d’Avenir Hospitalier et de la Confédération des Praticiens des Hôpitaux, organisation majoritaire aux dernières élections professionnelles pour le Conseil Supérieur des Personnels Médicaux vous remercie pour l’écoute attentive lors de notre audition au Sénat du 9 décembre 2021. Nous vous remercions pour le rapport que vous avez publié le 29 mars 2022 et nous nous permettons de vous rappeler notre proposition de réfléchir ensemble sur les modalités législatives à mettre en œuvre pour faire évoluer la situation de l’Hôpital Public et de l’accès à un juste soin qui se dégradent sur l’ensemble du territoire national.

Nous représentons les médecins, pharmaciens, odontologistes des hôpitaux et faisons partie des corps intermédiaires élus. Nous sommes issus du terrain et des terroirs de notre Nation. Nous appartenons à l’Hôpital Public pour lequel nous œuvrons jour et nuit pour permettre un accès aux soins à tous nos concitoyens, vos électrices et vos électeurs, pour qu’en France vivre en bonne santé soit et reste une réalité.

Dans cette lettre nous vous résumons une partie de notre analyse sur les points de blocage et les leviers que la Loi devra changer pour que demain le pilier Santé retrouve sa juste place dans notre société. Pour que l’ensemble des praticiens et soignants des établissements de santé, du médico-social comme de la ville puissent retrouver la sérénité d’exercice dont ils ont besoin pour répondre aux attentes des patients et de leur famille.

Nous avons subi depuis des décennies le dogme de la rationalisation fiduciaire et notre système est à bout de souffle, au bord d’une rupture irrémédiable. La France qui dans les années 2000 était à la pointe de la médecine dans le monde se retrouve aujourd’hui au 23ème rang.

Notre rôle de corps intermédiaire a été trop souvent ignoré et parfois maltraité par une gangue administrative qui a parfois perdu le sens des valeurs de notre société. Nous connaissons bien les territoires et ce que nous avons à faire pour le bien commun. Nous vous l’avons démontré depuis longtemps et encore plus lors de la première vague Covid. Nous avons alerté également maintes fois pour que les choses évoluent…

Il semble temps aujourd’hui de changer de méthode et de retrouver des objectifs quantitatifs acceptables mais surtout qualitatifs en termes de juste soin pour les patients et d’équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle pour nous vos soignants. Ces conditions sont indispensables pour que nos concitoyens puissent retrouver une espérance de vie en bonne santé superposable à celle des autres pays et que les acteurs du soin que nous sommes puissent également retrouver le sens de leurs métiers.

Nous ne sommes pas abstentionnistes ou spectateurs passifs mais des acteurs engagés pour construire le renouveau tant attendu par les Françaises et les Français et clairement exprimé ces dernières semaines. Nous sommes et serons là pour vous aider à reconstruire et à moderniser l’existant pour que le vivre ensemble en bonne santé ne soit plus un mirage mais redevienne une réalité pour toutes et tous en tout point du territoire.

APH est à votre disposition pour travailler dans cette direction dans un respect mutuel et autour des valeurs de notre République.

Prenez soin de vous, des vôtres et de la santé de vos administrés comme celle de l’Hôpital Public et de notre système de soin.

 

APH REAGIT A LA « NOTE AU GOUVERNEMENT » DE MARTIN HIRSCH

 

Tribune APH du 9 mai 2022

 

Martin Hirsch, directeur général de l’APHP, s’est autorisé à envoyer une « note au gouvernement » [1] qui ressemble à un acte de candidature au poste de ministre chargé de la Santé. Dans cette note, adressée en copie à la presse, il étale ses réflexions et ses propositions pour l’hôpital public… Nous nous limiterons ici à commenter ses propositions, exposées comme une profession de foi.

Faire le constat du naufrage de l’hôpital public, annoncé par les syndicats depuis longtemps, fait désormais l’unanimité. Les discours des politiques et des administratifs assurant que l’hôpital tient toujours debout, qu’il a tenu pendant la pandémie, que la résilience des hospitaliers est inaltérable ne sont que façade. La réalité de notre quotidien est tout autre : la souffrance des hospitaliers explose, déprogrammations et fermetures de services résultent du manque de professionnels paramédicaux et médicaux, qui fuient en nombre le service public hospitalier. Nombre de celles et ceux qui restent encore sur le front sont rongés par un épuisement professionnel et personnel.

Cependant, les angles de vue proposés par Martin Hirsch sont inquiétants, en profond décalage avec les métiers du soin et la notion de service public.

  • Considérer que le soin se résume à une productivité mesurable est d’une cruelle indécence pour tous ceux dont on salue la vocation, l’humanisme et tout simplement le professionnalisme. Dans quelque secteur du soin que ce soit, le geste technique – qui rapporte à l’hôpital – n’est rien sans la relation du soignant avec le patient, sans le travail d’équipe, sans la réflexion sur son propre travail. C’est pourtant bien cette perte de sens qui fait fuir ou qui épuise les professionnels de santé.
  • Considérer que le professionnel de santé est un pion qui joue individuellement et que l’on peut balader d’un service à l’autre, d’un établissement à l’autre, d’une région à l’autre est encore une fois oublier le sens du soin à l’hôpital. Une équipe se construit, a une histoire, un projet, elle se renouvelle, mais doit savoir garder ceux qui s’investissent pour elle et doit donner la possibilité à chacun de s’investir, pour se sentir partie prenante de l’œuvre commune de soigner, d’accompagner et du vivre ensemble.
  • Considérer l’hôpital sans la ville oublie que le système de santé doit être centré autour du patient, et de son médecin traitant, et non du CHU parisien. Le champ du médico-social semblerait aussi avoir été omis… Le passage à l’hôpital d’un patient ne devrait se faire que lorsque les moyens de la ville et du premier recours sont dépassés : compétences spécialisées, plateaux techniques et maternités.
  • Défier les corps intermédiaires élus et donc légitimes, c’est-à-dire les syndicats – ce terme n’est même pas mentionné dans sa note – comme ne défendant pas les intérêts des praticiens est particulièrement déplacé. L’exemple de la discussion lors du Ségur sur la permanence des soins… à laquelle il n’a pas participé, contrairement à nous ! – en dit long sur sa vision du dialogue social…

Ainsi, ses propositions sont-elles également en décalage avec les métiers du soin hospitalier.

  • L’attractivité (jamais nommée dans la « note ») ne peut se résumer au problème des rémunérations. Il est si facile d’occulter les réelles difficultés : permanence des soins, temps de travail, reconnaissance de la pénibilité, équilibre vie professionnelle et personnelle, adaptation des contraintes à la parentalité… Le Ségur a été insuffisant, quand il n’a pas été insultant pour les praticiens hospitaliers. Le chantier de l’attractivité est à ouvrir réellement, courageusement : c’est une des priorités à mettre en œuvre immédiatement.
  • La mobilité versus la carrière à vie ? Destructrice de l’équipe et de tout projet professionnel, la perpétuelle mobilité contribuerait à envoyer les praticiens vers des carrières « à vie » dans les établissements qui le proposent : les établissements privés. Si nous sommes d’accord sur le fait que la concentration des prérogatives « clinique, enseignement, recherche et management » sur les seuls hospitalo-universitaires n’a pas de sens, il n’y a en revanche aucune honte à être praticien hospitalier toute sa vie, ou pendant un temps long, dans un même établissement. Il n’y a aucune honte à y travailler sans aspiration hospitalo-universitaire. Le travail hospitalier des praticiens implique la constitution de projets à long terme, d’investissements financiers, mais aussi de création de réseaux avec la ville, le médico-social et de suivi des patients porteurs de pathologies chroniques complexes. Monsieur Hirsch sait-il seulement ce qu’est le travail d’un praticien hospitalier, d’un soignant ?
  • La casse du statut ? Oui, les professionnels de santé gagneraient à être reconnus ou assimilés à des fonctionnaires « régaliens », plutôt que de poursuivre leur engagement dans l’hôpital public tout en voyant des collègues faire de l’intérim pour des rémunérations qui vont jusqu’à dix fois la leur, pour produire de l’acte sans contribuer aux piliers essentiels de l’hôpital que sont l’équipe, les liens entre services et la vie institutionnelle. Tous ces nouveaux contrats dont rêve Monsieur Hirsch ne font pas avancer l’hôpital : ils continuent à le détruire davantage. Les professionnels de santé engagés dans l’hôpital public demandent seulement à être rémunérés en fonction du travail qu’ils réalisent, où pénibilité et responsabilité doivent être prises en compte.
  • La gouvernance souffre en tout premier lieu de démocratie, notamment dans la désignation des chefs de service et de pôle. Aucun projet de réforme de gouvernance ne peut voir le jour sans ce prérequis. L’évocation des instances médicales et paramédicales des instances de gouvernance n’appelle pas la comparaison suggérée par Martin Hirsch : ni leur composition ni leurs missions ne sont comparables, ce d’autant qu’aucune représentation syndicale médicale locale n’est actée dans les établissements publics de santé. Cette absence d’implication des syndicats de praticiens hospitaliers à l’échelon du territoire de santé est une anomalie qui interroge…

Action Praticien Hôpital ne cesse d’appeler à réformer le système de santé et continuera à porter les principes de la qualité de vie des praticiens hospitaliers ; c’est l’intérêt de l’hôpital public : ceux qui y travaillent, ceux qui y sont soignés. Pour nous, le statut de praticiens est un gage de sûreté pour ce corps mais également d’équité sur l’ensemble du territoire national. Contrairement aux propos de Monsieur Hirsch, le cadre qu’il définit comme « rigide » de l’hôpital public ne l’empêche pas d’évoluer. Au contraire, il sécurise une réforme nécessaire, tout en gardant les prérogatives du service public comme les valeurs de la République pour défendre notre système solidaire de santé.

Nous défendrons des actions pour promouvoir un renouveau du système hospitalier et de celui de la santé en conservant les fondamentaux comme ceux des statuts, des engagements par conviction au service des patients et dans un esprit d’équipe et avec une rémunération revalorisée mais sans lien avec de l’intéressement et de la spéculation.

Cette réforme sera coûteuse mais elle est nécessaire, et elle sera efficace.

Ayons le courage de définir la place de l’hôpital public dans le système de santé : il n’est en concurrence ni avec la médecine de ville, ni avec l’activité des cliniques lucratives dont les missions et les objectifs sont différents.

Ayons le courage de mettre sur la table le problème du temps de travail des praticiens hospitaliers, chantier éludé du Ségur, et mettons en regard les rémunérations avec le volume horaire de travail réalisé par les praticiens.

Ayons le courage de corriger l’erreur du Ségur qui a valorisé l’engagement des jeunes sans considérer celui de ceux qui tiennent l’hôpital public depuis des dizaines d’années : donnons à tous la bonification d’ancienneté de 4 ans.

Ayons le courage de mettre sur la table le chantier de la permanence des soins : pas timidement et de manière insultante comme au Ségur, mais par une revalorisation massive à hauteur de la permanence des soins effectuée par les libéraux (le rapport de l’IGAS sur le sujet n’est toujours pas public…), et par une prise en compte des effets collatéraux du travail de nuit : pénibilité, déséquilibre vie professionnelle – vie personnelle, morbidité induite et réduction de l’espérance de vie.

Ayons le courage d’officialiser les mesures d’attractivité plutôt que de laisser perdurer les petits arrangements opaques, à la limite de la légalité, dont le principe et de nombreux exemples sont pourtant connus des tutelles.

Ayons le courage de réformer la gouvernance en imposant une réelle démocratie sanitaire, dans la désignation des chefs de service et de pôle autour d’un projet médico-soignant. Donnons la possibilité de faire exister les syndicats médicaux dans les établissements au même titre que les syndicats paramédicaux. Les syndicats et leurs représentants ont un rôle à joueur pour faire vivre le dialogue social dans les établissements de soins mais également sur les territoires de santé.

Ayons le courage d’un dialogue social équilibré. Les erreurs de trajectoire pour l’hôpital public, et notamment les plus récentes, sont le fruit de négociations tripartites où directeurs et DGOS ont une connivence à peine voilée, tandis que la parole – et même le vote – des praticiens concernant les évolutions est quasiment ignorée. Écouter le terrain sans le suivre nous a conduit dans le mur. Appliquer les propositions des représentants légitimes que sont les syndicats est la seule planche de salut pour l’hôpital public : Action Praticiens Hôpital, union d’Avenir Hospitalier et de la Confédération des Praticiens des Hôpitaux, et ses composantes, représentant l’ensemble des spécialités médicales, odontologiques et pharmaceutiques, majoritaires chez les praticiens hospitaliers et les contractuels aux dernières élections professionnelles, sera présent et force de propositions.

Jean-François Cibien- Président AH, Président APH, 06 07 19 79 83

Carole Poupon - Présidente CPH, Vice-présidente APH ; 06 76 36 56 67

Yves Rébufat - Président exécutif AH , 06 86 87 62 76

[1] https://www.lesechos.fr/economie-france/social/hopital-le-temps-de-la-refondation-1404467

 

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