Soigner l’hôpital, par Agnès Buzyn, Acte I

 
 
En décembre 2017, durant un entretien accordé au journal Libération, Agnès Buzyn affirmait : « L’hôpital arrive au bout d’un système ». Elle ajoutait : « je compte bien réunir les acteurs concernés dès 2018 ». Nous y sommes ! 
À quel système faisait-elle référence ? À quels sujets compte-t-elle s’attaquer ? 
La rédaction revient sur les déclarations phares de la Ministre des Solidarités et de la Santé à travers l’œil du président d’Avenir Hospitalier. Economies à l’hôpital, lits en trop, ambulatoire : Renaud Péquignot commente la (future) méthode et le constat !
 
Avenir Hospitalier : Qu’avez-vous à répondre à Agnès Buzyn lorsqu’elle affirme qu’il faut supprimer des lits à l’hôpital ?
 
Renaud Péquignot : Certes, dans certains services, il arrive que des lits ne soient pas utilisés. Lorsqu’on recherche les causes, il faut se rappeler que dans notre pays, près de 30 % des postes de praticiens hospitaliers ne sont pas pourvus (chiffres du Conseil National de Gestion). De fait, certains lits sont fermés par manque de personnel médical mais certainement pas parce qu’ils sont inutiles ! 
Je demanderai à la Ministre, de me donner les preuves, chiffres à l’appui, des lits qui ne servent à rien. En prenant comme exemple mon hôpital, dans mon service, pour une place qui se libère, j'ai douze demandes.
Beaucoup de services sont saturés, notamment les urgences. En interrogeant les SAMU, on se rend compte des difficultés qu’ils ont à placer certains patients, notamment les patients âgés. De nombreux lits et de nombreux emplois passent déjà à la trappe chaque année, l’hôpital public est de plus en plus essoré. 
La situation s’aggrave au lieu de s’améliorer. Alors la question est de savoir où sont ces fameux lits qui ne servent à rien ? 
 
" Demander l’avis des syndicats est la meilleure façon de concilier les objectifs de qualité et de maîtrise des coûts ! "
 
Avenir Hospitalier : La Ministre avait d’abord évoqué 30 % d'actes inutiles puis elle s’est ravisée et le chiffre a baissé de 25 %, qu’est-ce que cela signifie selon vous ? 
 
Renaud Péquignot : Juste avant l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale 2018, fin octobre, la Ministre disait en septembre: « On sait bien que 30 % des dépenses sont inutiles ». Je ne sais pas qui est ce « on ». J'ai remarqué qu'en politique, quand on sort des chiffres de nulle part, on dit souvent « on sait bien que »… 
Un mois plus tard, elle passe à 25 % de dépenses inutiles... Cette manière de se rétracter prouve que ces chiffres étaient sujets à caution dès le départ. Il y a des choses qu'il faut revoir à la marge c’est vrai. Il faudrait revoir les termes utilisés et les chiffres annoncés afin de trouver des solutions adaptées aux réalités de l’hôpital public qui n’en finit plus de tirer la sonnette d’alarme. 
La seule enquête sur le sujet est déclarative (TNS pour la FHF en 2012) et montre que les praticiens hospitaliers sont 15 % à penser que plus de 20 % de leurs actes sont inutiles, et la moitié que 5 à 20 % de leurs actes le sont : au total ça fait moins de 10 % des actes qui sont inutiles au doigt mouillé : mais l’enquête se garde bien d’évoquer les causes. Protocoles rigides ? Pression des patients ? Cette dernière piste est à envisager sérieusement puisque les chiffres en médecine libérale sont plus élevés. 
 
Avenir Hospitalier : Favoriser la « chirurgie ambulatoire » comme le préconise la Ministre vous semble-il être une des solutions pour désengorger les hôpitaux et faire des économies ? 
 
Renaud Péquignot : Le virage ambulatoire semble être la « cause nationale » depuis quelques années. D’une part, il faut savoir que toutes les spécialités et tous les patients ne sont pas compatibles avec l’ambulatoire. 
Si on habitait tous dans des grandes métropoles, ce serait réalisable. Il existe des difficultés pour certains patients pour se rendre tôt le matin à l'hôpital et pour rentrer à domicile le soir, dans des territoires plus éloignés et moins desservis par les transports publics. 
D’autre part, le virage ambulatoire, ça n’est pas que des économies ! Outre le plus grand nombre de complications non détectées à temps, la Sécurité sociale nous rappelle régulièrement sa préoccupation de voir le nombre de prescriptions de transport s’envoler.
Les technocrates qui entourent le président raisonnent avant tout en termes d’argent disponible pour les plus aisés : les meilleurs soins ne sont pas leur première préoccupation. Mais les syndicats de médecins ont une expertise dans le domaine de l’optimisation des soins, et demander notre avis est la meilleure façon de concilier les objectifs de qualité et de maîtrise des coûts. Sans doute la seule qui soit réelle !
 
Saveria Sargentini, journaliste
 
 

L’histoire de l’OSAT

En 1998, Max-André Doppia est élu au Conseil d’Administration du SNPHAR-e. Très vite, il va mettre en débat la question de la souffrance des médecins à l’hôpital et la nécessité de l’explorer, de la comprendre, d’en dénoncer les causes, et de la prévenir. Cette souffrance devient la priorité de son action syndicale. Ce n’était pas facile au sein d’une organisation dévorée par les problématiques récurrentes sur le temps de travail et les différentes règlementations. Il impulse au début des années 2000, la création d’un Observatoire de la Souffrance Au Travail (OSAT) sur le site du SNPHAR-e, préfiguration de celui présent aujourd’hui sur le site d’APH. 
 

L’engagement d’un homme 

Si la durée excessive du travail s’avère un indéniable facteur de souffrance, elle n’est pas la seule. Déjà la confrontation des médecins et des soignants à la douleur, à la maladie et à la mort, peut générer en soi une souffrance, un épuisement professionnel : ce n’est pas un hasard si le « burn out » a été primitivement décrit dans les milieux du « care ». Mais depuis quelques décennies, la mise en pratique d’un management d’inspiration néolibérale, théorisée par le New Public Management (NPM), avec son cortège de recherche de productivité, de performance, avec réduction d’effectifs à la clé, a précipité de plus en plus de collègues et de soignants dans la souffrance au travail, avec parfois des issues fatales par suicide sur les lieux mêmes de l’hôpital. C’est la survenue de plusieurs d’entre eux en peu de temps qui amène le Collège Français d’Anesthésie-Réanimation (CFAR) à créer, en 2009, une commission SMART (Santé des Médecins Anesthésistes Réanimateurs au Travail). Max Doppia en sera tout naturellement nommé président. Il est alors un des précurseurs à faire prendre conscience à la collectivité de la problématique de la souffrance au travail et de l’importance de la santé des soignants pour la prise en charge de celle de nos concitoyens. Par son activité incessante et généreuse, il sera la cheville ouvrière de la création et de la diffusion d’outils qui permettent à chacun de tester sa souffrance ou ses addictions, de consulter les sources documentaires, de dépister la souffrance d’un collègue ou d’un proche, de trouver un lieu de parole et d’orientation.
 

« Dis doc t’as ton DOC ? » 

Max relayera son message sans relâche, grâce à ses mandats syndicaux et collégiaux, auprès des pouvoirs publics, Ministères, défenseur des droits, universités, organisations professionnelles et syndicales de toutes spécialités (urologues, radiologues, chirurgiens, médecins du travail, généralistes, internes, chefs de clinique), et au-delà, comme les magistrats.
Dernièrement, nous apprenions par le Quotidien du Médecin du 22 novembre dernier, qui titrait l’un de ses papiers « Bientôt un numéro d’appel unique pour aider les médecins qui souffrent », que le Conseil National de l’Ordre des Médecins et le Centre National de Gestion affichent leur action conjuguée pour venir en aide aux médecins en souffrance. C’est l’occasion de rappeler l'action volontariste, généreuse et continue, de Max Doppia, qui vient de disparaître brutalement. Grâce au travail de la commission SMART, des outils ont été créés et mis à disposition de l'ensemble du corps médical toutes spécialités et mode d'exercice confondus : un numéro vert, des tests d'auto­évaluation individuelle et en équipe, des fiches pratiques de conduite à tenir devant des problématiques de souffrance au travail.
Pour parachever son œuvre en faveur de la prévention et d’une meilleure prise en charge de ceux qui ont la responsabilité de la santé d’autrui, il aura l’audace de briser un tabou en proposant une campagne d’incitation des médecins à se choisir un médecin traitant. Il lance la campagne, « Dis doc, t’as ton doc ? », visant à provoquer un changement culturel des pratiques d'autodiagnostic et d'automédication de la majorité de nos confrères. Les outils de cette campagne, soutenue par de nombreux partenaires, dont la Ministère de la Santé et le Conseil de l'Ordre, des milieux syndicaux, des médias, et des Mutuelles, sont diffusés dans toutes les langues européennes et d'ores et déjà diffusés à l'étranger, en Europe et jusqu'au Canada.
Que Max Doppia soit ici chaleureusement remercié !
 
Richard Torrielli
 
 
 
Une conférence de presse organisée par APH a eu lieu à Paris le 7 décembre 2017 pour annoncer le lancement de l’OSAT.
 
ILS EN ONT PARLÉ :
 
 
 
 
 
 

Hommage à Max-André Doppia

 
Le 13 novembre 2017, nous avons brutalement perdu un ami, un collègue et un président d’intersyndicale qui nous était très cher. Lui qui construisait tout sur le long terme a été terrassé par un accident soudain. Lui qui avait consacré une énergie et un temps colossaux pour lutter contre la souffrance au travail, contre le fait terrible que des collègues y meurent tous les ans, a perdu la vie en pleine promotion de sa création, l’Observatoire de la Souffrance au Travail. Quelle ironie grinçante du sort que cette sortie prématurée ! Quelle terrible illustration de la nécessité de cette démarche !
 
L’OSAT est un aboutissement fondamental de l’engagement de Max-André Doppia : ce n’est pas qu’un observatoire performant pour évaluer l’intensité, la cause, et les risques des situations de souffrance au travail, c’est également un outil réactif permettant d’aider efficacement des collègues qui ont un besoin vital de ce que le syndicalisme produit de meilleur pour la défense énergique et permanente des collègues Praticiens Hospitaliers.
 
Praticien Hospitalier : Max-André avait embrassé ce statut peu après sa création en 1984. C’était la fin des contrats d’exception érigés en règle, et la consécration pour ceux qui voulaient dédier leur énergie et leurs compétences au service du public.
 
Parisien d’origine, Normand d’adoption, et heureux de l’être, Max-André avait retrouvé la capitale du fait de son action syndicale, commencée tôt dans sa carrière, tant la défense de ses collègues et de ce magnifique statut de PH lui tenait à cœur. 
 
Mais son amour de la justice avait même dépassé les frontières de notre pays lors de la guerre en ex-Yougoslavie : avec moins d’ostentation que certains dont l’action n’aurait pu s’envisager sans caméra, Max-André avait obtenu des résultats tangibles grâce à des actions de sensibilisation sur la misère des hôpitaux et des malades de Bosnie. Ces actions volontaristes – incluant l’achat d’un panneau publicitaire ! - avaient permis de récolter du matériel qui était réellement parvenu aux professionnels de santé. On aurait pu voir dans cette action un coup politique, ou de manière plus neutre une autre facette de Max-André, mais ce n’est pas ainsi qu’il la décrivait : il y avait quelque chose d’humaniste au sens large dans cet engagement, et le primum movens était fait de la même solidarité entre soignants, entre médecins hospitaliers au service des malades, que celle qui l’avait amené au syndicalisme.
 
La liste est longue des ses engagements institutionnels et sociétaires, au service de l’Anesthésie-Réanimation, des Praticiens Hospitaliers en général, ou de l’Hôpital dans son ensemble. 
L’aventure que nous avons vécue ensemble, c’est celle d’Avenir Hospitalier : une aventure syndicale mais aussi – et grâce à ça – une transmission philosophique sur ce que nous pouvons faire tant que nous sommes ici-bas. Max-André se consacrait à un grand nombre de sujets, au sein desquels apparaissait souvent quelque chose « d’important » qui méritait un coup de collier, une veille ou un bout de weekend pour faire le travail. C’est d’ailleurs le mot qu’il avait employé au téléphone quand je lui faisais remarquer avec un brin d’inquiétude que sa tournée pour la promotion de l’OSAT lui imposait des déplacements à un rythme rapide, enchaînés avec son activité clinique : « Oui Renaud, mais ça c’est important »… Un penseur célèbre fondateur de notre ère a dit il y a 2000 ans qu’il n’y a rien de plus grand que de donner sa vie pour son prochain, je suis confiant dans le fait que Max-André a été exemplaire sur ce chemin.
 
Sa remarquable faculté à accepter chacun avec sa part d’humanité faisait qu’il était difficilement imaginable d’être son ennemi, malgré les luttes qui font la vie syndicale. Même les adversaires habituels au sein des réunions ministérielles ont dû ressentir une affliction non-feinte à l’annonce de son décès : on ne pouvait avoir autre chose que du respect face à Max-André qui ne nourrissait aucun ressentiment vis-à-vis de personne. Ce n’était pas de l’oubli, c’était de la tolérance. Son ouverture d’esprit et l’écoute attentive de ses interlocuteurs lui permettaient d’intégrer leurs idées, même hostiles, pour promouvoir les siennes. Le bien-fondé de cette façon de réfléchir m’est apparu assez clairement pour que j’en fasse un parti-pris lors de mes discussions animées.
Max-André et moi échangions naturellement de nombreux mails, qu’on commençait souvent par « mon PV/ mon SGP » : Président vénéré/Secrétaire Général préféré : au-delà de la résonance volontairement ronflante, l’asymétrie d’adjectif, traduisait une relation quasi filiale. D’emblée, Max-André avait pris la présidence d’AH dans l’idée très claire d’en transmettre les rennes deux ans plus tard. Il était l’un des rares qui – vu sa taille ! – pouvait m’appeler « mon petit Renaud ». Ce ton paternaliste n’était pas là pour rappeler qui présidait mais plutôt « bientôt ça sera à toi d’y aller ».
 
Il pensait qu’il vaut mieux « obtenir ce qu’on veut qu’avoir raison ». Son but n’était pas de faire valoir son expertise ou son ouvrage, mais bien que ce qu’il construisait se réalise. Ses capacités et son expertise étaient au service de ses objectifs et non à celui de sa promotion personnelle. 
 
Comment rendre hommage à Max-André sans parler de bons plats ? Il était gourmet et gourmand, appréciant joyeusement la bonne nourriture, pas forcément la plus diététique… Une réunion de travail était toujours plus productive avec ou avant/après un repas de qualité, qu’il préférait prendre assis en bonne compagnie plutôt que debout dans la foule d’un cocktail. Autant de moments auxquels je repenserai avec émotion !
Max-André Doppia nous laisse une belle œuvre au service des collègues, des patients et de l’Humanité, souffrante ou pas. Chacun trace sa route, mais la sienne éclairera et inspirera la mienne, à cette présidence d’Avenir Hospitalier à laquelle il m’imaginait bien, élu après son départ à la retraite si méritée. Mais je sais qu’elle aurait été au service de ce qui était important !
 
Renaud Péquignot, Président d’Avenir Hospitalier
 
 
 

Compensation de l’augmentation de la CSG : le gouvernement peut mieux faire !

Avenir Hospitalier, au sein d’Action Praticiens Hôpital a pris connaissance que, conformément à ce que nous demandions depuis l’été, les praticiens hospitaliers ne sont pas oubliés dans le texte de compensation de l’augmentation de la CSG.

 
En effet, les personnels médicaux hospitaliers, qui ne font pas partie des salariés du privé, ni des fonctionnaires, risquaient fort d’être oubliés. De fait, nous n’étions invités à aucune réunion et risquions de ne pas voir cette baisse de salaire compensée. Nous en avions entretenu la Ministre de la Santé le 15 septembre 2017 et avons régulièrement interpellé le Ministère de la santé, le Ministère des finances et la DGOS à ce sujet.
 
Nous avons été entendus, puisque le Décret n° 2017-1889 du 30 décembre 2017 pris en application de l'article 113 de la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018 et instituant une indemnité compensatrice de la hausse de la contribution sociale généralisée dans la fonction publique publié au JO du 31 décembre 2017 s'applique aux praticiens hospitaliers. « En application de l'article 113 de la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 susvisée, une indemnité compensatrice est attribuée aux agents publics civils et militaires dans les conditions et selon les modalités fixées par le présent décret ».
 
Les agents publics, dont les personnels médicaux, pharmaceutiques et odontologiques hospitaliers font partie, vont bénéficier d'une indemnité mensuelle qui devrait couvrir la différence entre l'augmentation de la CSG et la suppression des cotisations d'assurance maladie et la cotisation « exceptionnelle » de solidarité. Cette différence sera donc effectivement compensée.
 
En revanche, les rémunérations issues des activités d'intérêt général et de l'activité libérale en sont exclues ce qui n’est pas acceptable, car cela va de fait conduire à une baisse des rémunérations des praticiens concernés. On ne voit pas pourquoi alors que les médecins libéraux devraient eux-mêmes bénéficier d’un mécanisme de compensation.
 
Nous sommes évidemment loin des engagements du Président de la République qui voulait, par une surcompensation, augmenter le pouvoir d’achat de tous les salariés. Et comme nous ne bénéficierons pas de la suppression de la taxe d’habitation, nous ne serons pas dans les bénéficiaires de cette mesure. Nos interventions répétées auprès des pouvoirs publics ont permis cependant d’éviter une baisse de notre rémunération hospitalière.
 
Avenir Hospitalier, au sein d’Action Praticiens Hôpital invite tous les médecins, pharmaciens et dentistes des hôpitaux à vérifier attentivement leur prochain bulletin de salaire et à nous signaler les éventuelles difficultés rencontrées.
 
Nous allons d’ores et déjà demander que l’ensemble des revenus des praticiens puisse bénéficier de cette compensation car il n’y a aucune raison que certains en soient exclus.
 
 

Avec le soutien du Groupe Pasteur Mutualité

 

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Campagne nationale
" Dis Doc', t'as ton doc' ? "  pour faire évoluer le modèle culturel des médecins !

 

Retrouvez toute l'information dans le communiqué de presse (cliquez ici)

www.cfar.org/didoc/ 

 

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Actu'APH n°16

       

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     Les annonces de recrutement octobre 2023

 

             retrouver ces annonces sur le site reseauprosante.fr

 

Les dernières actus

75 % DES MEDECINS HOSPITALIERS RISQUENT DE QUITTER L’HOPITAL PUBLIC DANS LES 5 ANS… … PARCE QUE PERSONNE NE PREND SOIN DES MEDECINS HOSPITALIERS.

MISSION-FLASH : UN NOUVEAU RATAGE GOUVERNEMENTAL (PREVISIBLE) !

Ce vendredi 1er juillet, Action Praticiens Hôpital dévoilait à la presse les résultats complets de l’enquête « Nuits Blanches » sur la permanence médicale des soins à l’hôpital public : 75 % des praticiens hospitaliers risquent de quitter l’hôpital public dans les 5 ans à cause de la permanence des soins. En parallèle, le rapport de la mission-flash sur les urgences était remis à la Première Ministre. Un rapport sans doute amoindri à la demande de la Première Ministre, puisque seules 41 des multiples propositions [CP1] [WA2] envisagées par la mission ont pu figurer dans le rapport.

le dossier de presse

Lettre aux élus De La République

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Paris, le 22 juin 2022

Monsieur le Président du Sénat,

Monsieur le Président, Madame la rapporteure de la commission d’enquête sur la situation de l’hôpital et le système de santé en France

Mesdames les Sénatrices, Messieurs les Sénateurs,


Action Praticiens Hôpital, union d’Avenir Hospitalier et de la Confédération des Praticiens des Hôpitaux, organisation majoritaire aux dernières élections professionnelles pour le Conseil Supérieur des Personnels Médicaux vous remercie pour l’écoute attentive lors de notre audition au Sénat du 9 décembre 2021. Nous vous remercions pour le rapport que vous avez publié le 29 mars 2022 et nous nous permettons de vous rappeler notre proposition de réfléchir ensemble sur les modalités législatives à mettre en œuvre pour faire évoluer la situation de l’Hôpital Public et de l’accès à un juste soin qui se dégradent sur l’ensemble du territoire national.

Nous représentons les médecins, pharmaciens, odontologistes des hôpitaux et faisons partie des corps intermédiaires élus. Nous sommes issus du terrain et des terroirs de notre Nation. Nous appartenons à l’Hôpital Public pour lequel nous œuvrons jour et nuit pour permettre un accès aux soins à tous nos concitoyens, vos électrices et vos électeurs, pour qu’en France vivre en bonne santé soit et reste une réalité.

Dans cette lettre nous vous résumons une partie de notre analyse sur les points de blocage et les leviers que la Loi devra changer pour que demain le pilier Santé retrouve sa juste place dans notre société. Pour que l’ensemble des praticiens et soignants des établissements de santé, du médico-social comme de la ville puissent retrouver la sérénité d’exercice dont ils ont besoin pour répondre aux attentes des patients et de leur famille.

Nous avons subi depuis des décennies le dogme de la rationalisation fiduciaire et notre système est à bout de souffle, au bord d’une rupture irrémédiable. La France qui dans les années 2000 était à la pointe de la médecine dans le monde se retrouve aujourd’hui au 23ème rang.

Notre rôle de corps intermédiaire a été trop souvent ignoré et parfois maltraité par une gangue administrative qui a parfois perdu le sens des valeurs de notre société. Nous connaissons bien les territoires et ce que nous avons à faire pour le bien commun. Nous vous l’avons démontré depuis longtemps et encore plus lors de la première vague Covid. Nous avons alerté également maintes fois pour que les choses évoluent…

Il semble temps aujourd’hui de changer de méthode et de retrouver des objectifs quantitatifs acceptables mais surtout qualitatifs en termes de juste soin pour les patients et d’équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle pour nous vos soignants. Ces conditions sont indispensables pour que nos concitoyens puissent retrouver une espérance de vie en bonne santé superposable à celle des autres pays et que les acteurs du soin que nous sommes puissent également retrouver le sens de leurs métiers.

Nous ne sommes pas abstentionnistes ou spectateurs passifs mais des acteurs engagés pour construire le renouveau tant attendu par les Françaises et les Français et clairement exprimé ces dernières semaines. Nous sommes et serons là pour vous aider à reconstruire et à moderniser l’existant pour que le vivre ensemble en bonne santé ne soit plus un mirage mais redevienne une réalité pour toutes et tous en tout point du territoire.

APH est à votre disposition pour travailler dans cette direction dans un respect mutuel et autour des valeurs de notre République.

Prenez soin de vous, des vôtres et de la santé de vos administrés comme celle de l’Hôpital Public et de notre système de soin.

 

APH REAGIT A LA « NOTE AU GOUVERNEMENT » DE MARTIN HIRSCH

 

Tribune APH du 9 mai 2022

 

Martin Hirsch, directeur général de l’APHP, s’est autorisé à envoyer une « note au gouvernement » [1] qui ressemble à un acte de candidature au poste de ministre chargé de la Santé. Dans cette note, adressée en copie à la presse, il étale ses réflexions et ses propositions pour l’hôpital public… Nous nous limiterons ici à commenter ses propositions, exposées comme une profession de foi.

Faire le constat du naufrage de l’hôpital public, annoncé par les syndicats depuis longtemps, fait désormais l’unanimité. Les discours des politiques et des administratifs assurant que l’hôpital tient toujours debout, qu’il a tenu pendant la pandémie, que la résilience des hospitaliers est inaltérable ne sont que façade. La réalité de notre quotidien est tout autre : la souffrance des hospitaliers explose, déprogrammations et fermetures de services résultent du manque de professionnels paramédicaux et médicaux, qui fuient en nombre le service public hospitalier. Nombre de celles et ceux qui restent encore sur le front sont rongés par un épuisement professionnel et personnel.

Cependant, les angles de vue proposés par Martin Hirsch sont inquiétants, en profond décalage avec les métiers du soin et la notion de service public.

  • Considérer que le soin se résume à une productivité mesurable est d’une cruelle indécence pour tous ceux dont on salue la vocation, l’humanisme et tout simplement le professionnalisme. Dans quelque secteur du soin que ce soit, le geste technique – qui rapporte à l’hôpital – n’est rien sans la relation du soignant avec le patient, sans le travail d’équipe, sans la réflexion sur son propre travail. C’est pourtant bien cette perte de sens qui fait fuir ou qui épuise les professionnels de santé.
  • Considérer que le professionnel de santé est un pion qui joue individuellement et que l’on peut balader d’un service à l’autre, d’un établissement à l’autre, d’une région à l’autre est encore une fois oublier le sens du soin à l’hôpital. Une équipe se construit, a une histoire, un projet, elle se renouvelle, mais doit savoir garder ceux qui s’investissent pour elle et doit donner la possibilité à chacun de s’investir, pour se sentir partie prenante de l’œuvre commune de soigner, d’accompagner et du vivre ensemble.
  • Considérer l’hôpital sans la ville oublie que le système de santé doit être centré autour du patient, et de son médecin traitant, et non du CHU parisien. Le champ du médico-social semblerait aussi avoir été omis… Le passage à l’hôpital d’un patient ne devrait se faire que lorsque les moyens de la ville et du premier recours sont dépassés : compétences spécialisées, plateaux techniques et maternités.
  • Défier les corps intermédiaires élus et donc légitimes, c’est-à-dire les syndicats – ce terme n’est même pas mentionné dans sa note – comme ne défendant pas les intérêts des praticiens est particulièrement déplacé. L’exemple de la discussion lors du Ségur sur la permanence des soins… à laquelle il n’a pas participé, contrairement à nous ! – en dit long sur sa vision du dialogue social…

Ainsi, ses propositions sont-elles également en décalage avec les métiers du soin hospitalier.

  • L’attractivité (jamais nommée dans la « note ») ne peut se résumer au problème des rémunérations. Il est si facile d’occulter les réelles difficultés : permanence des soins, temps de travail, reconnaissance de la pénibilité, équilibre vie professionnelle et personnelle, adaptation des contraintes à la parentalité… Le Ségur a été insuffisant, quand il n’a pas été insultant pour les praticiens hospitaliers. Le chantier de l’attractivité est à ouvrir réellement, courageusement : c’est une des priorités à mettre en œuvre immédiatement.
  • La mobilité versus la carrière à vie ? Destructrice de l’équipe et de tout projet professionnel, la perpétuelle mobilité contribuerait à envoyer les praticiens vers des carrières « à vie » dans les établissements qui le proposent : les établissements privés. Si nous sommes d’accord sur le fait que la concentration des prérogatives « clinique, enseignement, recherche et management » sur les seuls hospitalo-universitaires n’a pas de sens, il n’y a en revanche aucune honte à être praticien hospitalier toute sa vie, ou pendant un temps long, dans un même établissement. Il n’y a aucune honte à y travailler sans aspiration hospitalo-universitaire. Le travail hospitalier des praticiens implique la constitution de projets à long terme, d’investissements financiers, mais aussi de création de réseaux avec la ville, le médico-social et de suivi des patients porteurs de pathologies chroniques complexes. Monsieur Hirsch sait-il seulement ce qu’est le travail d’un praticien hospitalier, d’un soignant ?
  • La casse du statut ? Oui, les professionnels de santé gagneraient à être reconnus ou assimilés à des fonctionnaires « régaliens », plutôt que de poursuivre leur engagement dans l’hôpital public tout en voyant des collègues faire de l’intérim pour des rémunérations qui vont jusqu’à dix fois la leur, pour produire de l’acte sans contribuer aux piliers essentiels de l’hôpital que sont l’équipe, les liens entre services et la vie institutionnelle. Tous ces nouveaux contrats dont rêve Monsieur Hirsch ne font pas avancer l’hôpital : ils continuent à le détruire davantage. Les professionnels de santé engagés dans l’hôpital public demandent seulement à être rémunérés en fonction du travail qu’ils réalisent, où pénibilité et responsabilité doivent être prises en compte.
  • La gouvernance souffre en tout premier lieu de démocratie, notamment dans la désignation des chefs de service et de pôle. Aucun projet de réforme de gouvernance ne peut voir le jour sans ce prérequis. L’évocation des instances médicales et paramédicales des instances de gouvernance n’appelle pas la comparaison suggérée par Martin Hirsch : ni leur composition ni leurs missions ne sont comparables, ce d’autant qu’aucune représentation syndicale médicale locale n’est actée dans les établissements publics de santé. Cette absence d’implication des syndicats de praticiens hospitaliers à l’échelon du territoire de santé est une anomalie qui interroge…

Action Praticien Hôpital ne cesse d’appeler à réformer le système de santé et continuera à porter les principes de la qualité de vie des praticiens hospitaliers ; c’est l’intérêt de l’hôpital public : ceux qui y travaillent, ceux qui y sont soignés. Pour nous, le statut de praticiens est un gage de sûreté pour ce corps mais également d’équité sur l’ensemble du territoire national. Contrairement aux propos de Monsieur Hirsch, le cadre qu’il définit comme « rigide » de l’hôpital public ne l’empêche pas d’évoluer. Au contraire, il sécurise une réforme nécessaire, tout en gardant les prérogatives du service public comme les valeurs de la République pour défendre notre système solidaire de santé.

Nous défendrons des actions pour promouvoir un renouveau du système hospitalier et de celui de la santé en conservant les fondamentaux comme ceux des statuts, des engagements par conviction au service des patients et dans un esprit d’équipe et avec une rémunération revalorisée mais sans lien avec de l’intéressement et de la spéculation.

Cette réforme sera coûteuse mais elle est nécessaire, et elle sera efficace.

Ayons le courage de définir la place de l’hôpital public dans le système de santé : il n’est en concurrence ni avec la médecine de ville, ni avec l’activité des cliniques lucratives dont les missions et les objectifs sont différents.

Ayons le courage de mettre sur la table le problème du temps de travail des praticiens hospitaliers, chantier éludé du Ségur, et mettons en regard les rémunérations avec le volume horaire de travail réalisé par les praticiens.

Ayons le courage de corriger l’erreur du Ségur qui a valorisé l’engagement des jeunes sans considérer celui de ceux qui tiennent l’hôpital public depuis des dizaines d’années : donnons à tous la bonification d’ancienneté de 4 ans.

Ayons le courage de mettre sur la table le chantier de la permanence des soins : pas timidement et de manière insultante comme au Ségur, mais par une revalorisation massive à hauteur de la permanence des soins effectuée par les libéraux (le rapport de l’IGAS sur le sujet n’est toujours pas public…), et par une prise en compte des effets collatéraux du travail de nuit : pénibilité, déséquilibre vie professionnelle – vie personnelle, morbidité induite et réduction de l’espérance de vie.

Ayons le courage d’officialiser les mesures d’attractivité plutôt que de laisser perdurer les petits arrangements opaques, à la limite de la légalité, dont le principe et de nombreux exemples sont pourtant connus des tutelles.

Ayons le courage de réformer la gouvernance en imposant une réelle démocratie sanitaire, dans la désignation des chefs de service et de pôle autour d’un projet médico-soignant. Donnons la possibilité de faire exister les syndicats médicaux dans les établissements au même titre que les syndicats paramédicaux. Les syndicats et leurs représentants ont un rôle à joueur pour faire vivre le dialogue social dans les établissements de soins mais également sur les territoires de santé.

Ayons le courage d’un dialogue social équilibré. Les erreurs de trajectoire pour l’hôpital public, et notamment les plus récentes, sont le fruit de négociations tripartites où directeurs et DGOS ont une connivence à peine voilée, tandis que la parole – et même le vote – des praticiens concernant les évolutions est quasiment ignorée. Écouter le terrain sans le suivre nous a conduit dans le mur. Appliquer les propositions des représentants légitimes que sont les syndicats est la seule planche de salut pour l’hôpital public : Action Praticiens Hôpital, union d’Avenir Hospitalier et de la Confédération des Praticiens des Hôpitaux, et ses composantes, représentant l’ensemble des spécialités médicales, odontologiques et pharmaceutiques, majoritaires chez les praticiens hospitaliers et les contractuels aux dernières élections professionnelles, sera présent et force de propositions.

Jean-François Cibien- Président AH, Président APH, 06 07 19 79 83

Carole Poupon - Présidente CPH, Vice-présidente APH ; 06 76 36 56 67

Yves Rébufat - Président exécutif AH , 06 86 87 62 76

[1] https://www.lesechos.fr/economie-france/social/hopital-le-temps-de-la-refondation-1404467

 

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